Sunday 7 January 2018

8b. Blondin Massé et al (2012) Symbol Grounding and the Origin of Language: From Show to Tell

Blondin Massé et al (2012) Symbol Grounding and the Origin of Language: From Show to Tell. In: Origins of Language. Cognitive Sciences Institute. Université du Québec à Montréal, June 2010. 

Vincent-Lamarre, Philippe., Blondin Massé, Alexandre, Lopes, Marcus, Lord, Mèlanie, Marcotte, Odile, & Harnad, Stevan (2016). The Latent Structure of Dictionaries  TopiCS in Cognitive Science  8(3) 625–659


Le succès adaptatif des organismes dépend de la capacité de faire la bonne chose avec le bon type de chose. C'est la catégorisation. La plupart des espèces peuvent apprendre des catégories par expérience directe (induction). Seuls les êtres humains peuvent acquérir des catégories par ou i-dire (instruction). Les simulations de vie artificielle montrent l'avantage évolutif de l'enseignement par rapport à l'induction. Les expériences électrophysiologiques montrent que nos deux façons d'acquérir les catégories partagent encore certaines caractéristiques communes. Les analyses graphique-théoriques montrent que les dictionnaires sont constitués de mots plus concrets, acquis à partir de l'expérience directe; et le sens des mots dans le reste du dictionnaire peuvent être appris à partirs de la définition seule, en combinant les mots de base dans les propositions sujet / prédicat avec des valeurs véridiques (vrai/faux). Le langage est advenu lorsque le mime intentionnel a été converti en séquences arbitraires de noms de catégories partagées décrivant et définissant de nouvelles catégories via des propositions.

Harnad, S. (2004). Retour à la tradition orale: écrire dans le ciel à la vitesse de la pensée.

Saint-Gerand, J. P. (2014). Steven Pinker, L'instinct du langageQuestions de communication, (2), 236-237.

Demoule, J. P., Encrevé, P., & Laks, B. Origine de l'homme, origine des langues: retrospective et perspectives.


11 comments:

  1. Cet article très clair et précis résume parfaitement bien plusieurs points dont on a discutés depuis le début de la session. Il dit que la question de l’origine du langage repose sur l’origine de la grammaire universelle. Comme nous le savons, la grammaire universelle est l’ensemble de règles qui sont communes à toutes les langues, et elle serait innée, car les enfants ne font jamais de fautes de grammaire universelle. Le problème de la grammaire universelle est que, si elle est innée, il faudrait techniquement être capable d’expliquer son apparition de manière évolutive. Or, il ne semble pas y avoir d’étapes ayant menés au langage, car il faudrait que ces étapes, des sortes de protolangues, nous permettent de dire certaines choses, mais pas toutes. Or quelles choses nous permettraient-elles de dire ou de ne pas dire et pourquoi? Une fois que l’on peut dire quelques mots, ne peut-on pas justement dire tout, ce qui est la définition même du langage? Comme l’existence de protolangues ne semble pas logique, on peut en déduire qu’il n’y avait pas d’étapes intermédiaires entre le non-langage et le langage.

    L’article continue en parlant d’une théorie de l’évolution du langage. Tout d’abord, on aurait commencé par développer l’induction sensorimotrice. L’induction permet d’analyser les actions des autres et d’en tirer des conclusions. Par exemple, si quelqu’un de mon groupe arrose toujours un type de champignon, je finis par reconnaître les types de champignons à arroser. Puis, s’il marque toujours un type de champignon, je finis par reconnaître le type de champignon à marquer. Il s’agit ici de l’ancrage des symboles. L’induction consiste à constater par soi-même que cette personne mange toujours les champignons qui sont à la fois arrosés et marqués, ce qui nous permet de créer par nous-même la catégorie des champignons mangeables. Les gènes d’induction se seraient ainsi passés de génération en génération, car ils permettent un apprentissage plus rapide. Par la suite, il y aurait eu le désir d’apprendre à quelqu’un d’autre les catégories sans la présence des objets. Par exemple, une mère pourrait vouloir apprendre à son enfant à distinguer les bons champignons des mauvais, et pour ce faire, mimerait les champignons en question. Et ces gestes, qui à la base étaient des mimes, se seraient peu à peu transformés en symbole, avec des formes arbitraires, et ce serait le début des propositions. Comme ceux qui étaient curieux et motivés à apprendre la langue pouvaient profiter des avantages d’apprendre les catégories rapidement, ce gène de motivation (de nommer, de décrire et de partager les catégories) s’est transmis de génération en génération. C’est justement ce gène qui nous différencierait des chimpanzés qui, eux, ne semblent pas avoir cette motivation. Et pour finir, on serait par la suite passé de la gestuelle au vocal, afin de libérer nos mains pour faire d’autres actions.

    Donc, en résumé, les étapes évolutionnistes de l’origine du langage seraient le développement d’une capacité d’induction, la volonté de transmettre les catégories ainsi apprises à l’aide de mimes puis de symboles arbitraires, et finalement la motivation d’apprendre ces catégories.

    La question qui je me pose maintenant est la suivante. Quel est le lien entre cette théorie évolutionniste du langage et la grammaire universelle? En d’autres mots, en quoi cette théorie explique-t-elle ces règles innées communes à tous les humains? Le fait d’avoir développé de manière évolutionniste une motivation d’apprendre les catégories (et donc le langage) ne semble pas expliquer notre capacité de connaître intuitivement les règles de la grammaire universelle. À quelle étape de cette évolution seraient apparues les règles de grammaire universelle? Et plus encore, pourquoi a-t-on besoin d'une grammaire universelle, quelle est son utilité?

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    1. Il ne s'agit pas de seulement apprendre « quelques mots » (c. 750 - 1500 mots, au juste) mais de pouvoir et vouloir les traiter comme des propositions sujet/prédicat ayant une valeur vraie/fausse. La cognition et la motivation propositionnelle.

      Pour apprendre à catégoriser les champignons, il ne faut pas commencer avec l'imitation, mais par l'essai et erreur (apprentissage supervisé). C'est comme ça qu'on ancre les mots de bases: en direct. (Sans ça, quand il n'y a personne qui sait déjà les catégories de base, on ne les apprend jamais.) C'est lorsqu'il y des catégories qui sont des combinaisons des catégories qu'on a déjà ancrées que l'on peut les apprendre à partir des propositions provenant de ceux qui les savent déjà.

      Et la valeur des propositions est qu'il n'est pas nécessaire de mimer (comment on mime les champignons?): on n'a qu'à dire (définir ou décrire la nouvelle catégorie par des propositions).

      Le mime précède les propositions. Une hypothèse serait que le raccourcissement des gestes de mime qu'on répète fréquemment et que tout le mondereconnais déjà, rend les gestes de moins en moins iconiques et de plus en plus arbitraire, servant éventuellement comme noms de catégories, pour recombiner en propositions, lorsqu'on est rendu aux propositions.

      Cette hypothèse n'explique en rien ni l'origine, ni l'évolution ni la valeur adaptative de la grammaire universelle (GU)! C'est justement pour ça que le problème d'expliquer l'évolution de la GU est un problème difficile (bien que ce n'est pas LE problème [du ressenti]).

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  2. Dans le cadre du cours, lorsqu’on parle du pouvoir nucléaire du langage, on veut dire qu’on peut tout dire et décrire avec le langage (proposition=sujet et prédicat). C’est ce qui distingue le langage, propre à l’humain, des différentes autres formes de communication.
    L’exemple du dictionnaire chinois-chinois et la chambre de Searle montre que la computation n’est pas assez pour expliquer le langage (et la cognition). Des manipulations de symboles sont insuffisantes sont pour expliquer le sens d’un mot, le ressenti que procure que mot(ça ressemble à quelque chose de comprendre le chinois). Avant cela, il faut que le sens du symbole ou du mot ait été «groundé» Le langage est ‘’grounder’’ dans nos capacités non-linguistiques, nos capacités sensorimotrices. L’expression ‘’Une image vaut mille mots’’ résume bien le rôle des capacités sensorimotrices. On peut décrire l’image avec des mots, mais la voir rajoute un traitement d’information supplémentaire.
    Aussi, même les mots ne sont pas clairement définis. On peut faire l’exercice d’écrire un mot et de faire un réseau de mots partant de ce mot là pour le décrire. On peut ensuite effacer des mots de ce réseau pour voir le minimum de mots nécessaire pour définir ce mot-là. Cette exercice peut aussi être fait avec un vrai dictionnaire et ainsi réduire le nombre de mots dans celui pour éviter les redondances de certaines définitions, mais aussi pour arriver à ce qu’on appelle dans le cours «un ensemble minimal de mot», des mots qui combinés ensemble peuvent définir tous les autres mots. Il existerait plusieurs ensembles minimaux de mots indépendants des autres pour un même mot. On peut donc définir un mot à partir de différents groupe de mots dont le sens est indépendant. Les mots de cet ensemble minimal serait appris par essai-erreur (ou par induction sensorimotrice) et permettrait d’acquérir les autres mots par bouche à oreille (hearsay).
    Chez des enfants en bas âge, on voit le phénomène de «fast mapping», où ils acquièrent facilement et plus rapidement le sens de nouveaux mots, ce qui pourrait expliquer l’explosion de leur vocabulaire. C’est un exemple de mots «groundé» qu’ils utilisent pour définir d’autres mots.
    Le langage serait donc un avantage évolutif. Apprendre par essai-erreur est couteux en temps et risqué pour un organisme. «Grounder» un ensemble minimal de mots ou de catégories par induction sensorimotrice et utiliser ces mots ou catégories pour définir le reste serait plus économique et plus sécuritaire. Des expériences et des simulations du professeur Harnad avec des personnages virtuels montre l’avantage de l’apprentissage explicite sur l’apprentissage par essai-erreur. Le langage aurait évolué du mime, en passant par le langage gestuelle et éventuellement au langage oral justement à cause du pouvoir adaptatif du langage oral. Cependant, la transition du gestuel à l’oral reste encore un mystère.
    L’article «L’émergence et l’évolution du langage humain du point de vue des neurosciences» de Jacques François aborde plusieurs théories sur l’origine du langage. Celle de Michael Arbib suggère de voir l’origine du langage comme une boucle rétroactive entre l’oral et le gestuel plutôt que de se demander laquelle vient le premier.
    Bref, la complexité du langage demande définitivement une approche multidisplinaire, mais on peut aussi se demander si l’intégration des informations de toutes ses différentes disciplines ne complexifie pas la tâche davantage.
    James Najem

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    1. Le gestuel a l'avantage qu'on peut mimer beaucoup plus avec les gestes qu'avec les sons.

      En français on dit « ancrer » plutôt que « grounder »...

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  3. Tout comme Chomsky, l’auteur de l’instinct du langage, Steven Pinker retrouve aussi ses explications à l’égard des bases innées de l’être humain. En effet, la capacité d’apprendre un langage, ne serait en aucun cas culturel, mais plutôt une partie intégrée à notre cerveau. Cette capacité à apprendre une langue est loin d’être simple puisqu’elle se retrouve dès un très jeune âge chez l’enfant. Cette capacité nécessite aucun effort conscient pour l’enfant puisque sa base de données concernant son apprentissage n’est pas assez large pour réellement faire la compréhension de ces règles. Pinker explique que cette capacité aurait une place précise à l’intérieur de notre cerveau, qui se nomme l’instinct.
    Cet instinct de langage est encore aujourd'hui remis en question par plusieurs et toujours dans l’attente que l’auteur de cette thèse explique réellement les bases de ces gènes de la grammaire.
    Étant un aspect des plus importants pour le futur de l’intelligence artificielle, le langage se voit comme étant une discipline qui ne peut être mise de côté en raison des capacités que ces machines auront à améliorer le monde dans lequel nous vivons. Par contre, la thèse de l’instinct du langage, met-elle des bâtons dans les roues à cette évolution technologique?

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    1. Tu ne fais pas la distinction entre la grammaire ordinaire (GO), qui s'apprend par apprentissage supervisé, et la grammaire universelle (GU), qui ne s'apprend pas, car les enfants ne font ni entendent les erreurs de GU, donc a fortiori il n'y a pas de correction non plus.

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  4. Pour déterminer l’origine du langage, il faut d’abord définir ce qu’est réellement le langage. Il est nécessaire également de faire la distinction entre langage et langue en français, où le langage est le mode de communication utilisé par les humains, et la langue correspond à l’abstraction qui appartient à une communauté linguistique donnée. Dans le texte, « natural language » réfère donc à la langue. La question de l’origine du langage repose alors sur l’origine des langues, qui se distinguent de tout autre type de communication puisqu’elles sont les seules à remplir le critère de pouvoir exprimer tout ce qui peut être exprimé. Ce critère peut être vérifié selon deux tests, soit celui de la « glossabilité », qui suggère qu’une langue est un système de symboles avec lesquels toutes propositions peuvent être exprimées, et celui de la « traductibilité », qui vérifie que tout ce qui peut se dire dans une langue peut être traduit et dit dans une autre langue. Le premier test implique deux concepts qui nécessitent d’être définis :
    Propositions = énoncé composé d’un sujet et d’un prédicat qui peut être vrai ou faux
    Système de symboles = « objets » de forme arbitraire mis ensemble selon des règles « formelles » (opérant selon la forme des symboles) et qui peuvent être interprétés sémantiquement une fois regroupés.
    Les auteurs suggèrent que la langue serait dérivée d’un système gestuel ayant pour but d’enseigner la bonne catégorisation des symboles initialement apprise par induction. D’autres théories ont aussi été développées au cours des années, mais je me demande à quel point la connaissance de l’origine du langage peut avoir un impact sur les connaissances de la cognition. Pour y accorder autant d’importance, le langage est-il lié à tous les autres processus cognitifs?

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    1. Une grande partie de la cognition est la capacité à apprendre les catégories (« faire la bonne chose...») et le langage est notre moyen le plus puissant pour acquérir les nouvelles catégories.

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  5. Les langages naturels comme le Français et l'Anglais (les expressions logiques et les mathématiques représentent des sous-catégories de ces langages) contiennent des caractéristiques comme la glossabilité (toute proposition peut être exprimée à travers le système de symbole constituant le langage), le fait que chaque proposition est une proposition sur l'appartenance d'une chose à une catégorie et, finalement, la version de Massé, Harnad et St-Louis de la thèse glossabilité, la thèse de traduction (toute chose pouvant être dite dans un langage naturel peut être dite dans un autre langage naturel). Il faut aussi comprendre qu'un symbole se définit comme un objet possédant une forme physique arbitraire qui n’existe pas et ne se définit pas de manière isolée, mais bien dans un système de symbole qui comprend d'autres objets de la sorte, mais aussi des règles qui dirigent leur arrangement.

    Il est suggéré dans le papier que la naissance du phénomène langagier qu’est la proposition est due à la capacité d’instruction intentionnelle à travers le mime. Les noms de catégorie deviendrait plus petit et rapide à partir du moment où leur intention propositionnelle serait construite et accepté par l’apprenant et l’instructeur. En ce qui attrait aux primates non-humains, nous ne sommes pas sûr qu’ils comprennent les propositions (et la valeur de vérité qui vient avec elles) et pas simplement les associations. On suppose qu’une forme d’évolution Baldwinienne aurait favorisé chez notre espèce (plus sociale, plus interdépendante que les chimpanzés ne le sont), une disposition à apprendre et à utiliser des symboles de manière propositionnelle.

    Les origines du langage ne correspondent aux origines du langage ou de la communication vocale. Au moment où le langage a démontré ses bénéfices adaptatifs, il a migré vers la modalité vocale. Cette migration serait due aux avantages évolutifs qui viennent du fait de se libérer les mains. De toute façon une fois que le les noms peuplant le langage sont devenu arbitraire la modalité sensorielle n’a plus d’importance. Une raison de croire en la nature adaptative du langage serait une simulation informatique mise de l'avant dans l'article qui démontre l'avantage de créature utilisant des instructions (langages) en ce qui a trait à l'obtention de ressources comestibles. Les créatures de la simulation opérant avec une capacité langagière d'instruction ont survécu en plus grand nombre et se sont reproduit en plus grands nombre que leurs rivaux. Si il existe une Grammaire Universelle (G.U.), elle surement s'avère centrale au langage alors une grande partie du questionnement sur l'origine du langage pourrait être adressé en investiguant.

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  6. Le langage est une capacité de communication unique. D’un point de vu évolutif, il permet d’apprendre de nouvelles choses, de nouvelles catégories via échange de mot sans le besoin d’expérimenter par essai-erreur. Il permet de gé donc sans avoir à utiliser nos systèmes sensori-moteurs. C’est un gain énorme pour notre espèce. Il gérerent un avantage considérable dans l’échange des savoirs.

    Cela soulève la question suivante: peut-on dire que le langage était pré-encodé dans notre génome ou bien que notre génome l’a encodé car il a donné des capacités de survie à notre espèce en lui fournissant un système d’instruction très puissant ? 

    Les champignons vénéneux est un bon exemple. Si nous mangions une petite quantité d'un champignon vénéneux, nous tomberions malades et, par erreur, nous aurions appris ce qu'est un champignon comestible en les classant par catégories. Voir quelqu'un qui tombe malade pourrait nous faire beaucoup apprendre, mais ce n'est pas encore une instruction,
    Avec le langage, nous sommes capables d’expliquer ce qu'est un champignon comestible et ainsi d'en informer les autres avec beaucoup de précision. Sans le language, la culture ne serait pas possible, du moins de la façon dont nous la connaissons.

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  7. « The latent structure of dictonnaries » cherche à faire valoir les dictionnaires pour leur capacité à avoir a rendu le langage non-seulement accessible, mais aussi pour avoir standardisé les mots en les ancrant dans leur fonction et structure étymologique pure. C’est sans doute une étude laborieuse qui s’est voulue être la plus objective possible, parce que la signification des mots peut être sujette à maintes interprétations, étant ancré en chaque individu de manière nuancée et propre à son expérience. Cela dit, pour définir un mot dans le dictionnaire, chaque mot est investigué afin d’en faire la description la plus juste. On décortique ainsi les mots de manières systématiques mais aussi en considérant leur impact sensorimoteur. Le dictionnaire donne ainsi accès une base de données immense servant de point de départ à toute communication.

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